Comme une nostalgie

Pendant cette période où nous étions tous suspendus au plafond par un pied, au-dessus de quantités de vides empilés, certains ont commencé à regarder les choses, et puis à fixer les choses.


Jour après jour une nouvelle chose était fixée.





Une première épidémie de conception chinoise avait, il faut bien le reconnaître, un peu déçu. On pouvait en louer la vitesse de propagation, le caractère tout-terrain, la persistance sur plastiques, une compatibilité rendue élevée par le peu d’options de personnalisation offerte, un sex-ratio enfin favorable aux femmes. Mais, en définitive, les symptômes brouillons, les mutations aléatoires, et des taux de mortalité sans cesse discutés à la baisse malgré les annonces triomphales, avaient conféré à l’épidémie un caractère de gadget d’une saison.






Les promesses n’avaient pas résisté aux études sérieuses et la plupart des pays avaient opté pour la relocalisation, préférant construire leurs propres épidémies, sur place, quitte à réveiller des savoir-faire disparus ou inemployés de longue date.
















Quelle joie de retrouver une variole au milieu des vieux sabots de pépé au grenier, dans la ferme inhabitée où la famille venait seulement, entre deux voyages coûteux, passer les quinze jours d’un mois d’août.

Quelle joie de râper une grippe espagnole, crachée sur les mouchoirs de coton dont seule la couleur avait un peu passé, et, après l’avoir fait sauter dans les braises, d’en partager les miasmes à la veillée, entre cousins.

On retrouvait la tuberculose, à laquelle on agréait à nouveau des mérites.

Même les pneumonies regagnaient des couleurs.
Elles couchaient un gaillard pour quatre à six semaines. De quoi renvoyer l’épidémie chinoise au rang des grippettes saisonnières, affriolantes tant qu’en vitrine, et qui ne tombaient jamais bien quand on les portait.


Parfois, il y a comme ça des envies de cousu-main.